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Coups de coeur à Arles

Quand Wang Qingsong regarde la Chine s’aligner sur les valeurs occidentales, au détriment de l’héritage culturel de son pays, il trouve une énergie créatrice qui lui fait imaginer les allégorie les plus débridées pour nous l’expliquer. Dans ses mises en scène méticuleuses, le réalisme fantasmé le dispute à la pédagogie.

Lorsqu’il dépeint les développements rapides qui touchent la Chine, il le fait en de grandes fresques sur lesquelles se déroule une histoire, en général assez éloquente. La satyre est partout présente, en particulier dans l’usage détourné de sujets de la peinture classique occidentale. Souvent, ce sont des marques de produits occidentaux qui, confrontés à des réalités chinoises, servent de révélateurs de la frivolité des nouveaux comportements des chinois.

La juxtaposition parfaitement maîtrisée de diverses iconographies, fait constamment ressortir les clivages entre l’orient et l’occident en de provocantes métaphores. Et si l’ensemble peut parfois nous sembler un peu kitsch, n’oublions pas que le kitsch « ...est surtout corollaire des goûts de son observateur. » (Wickipédia)

Il est intéressant de constater que ce type de mise en boîte des méfaits de la consommation n’est possible aujourd’hui qu’en Chine. Dans nos contrées, cela ne frappe plus guère, car nous avons eu le temps de nous habituer ! En Chine, le déferlement est extrêmement rapide. C’est un capitalisme aguerri et conquérant qui débarque en force, dans un pays aux ressources immenses et rendu réceptif par des années de privations. Pourtant, à bien y regarder, la démarche métaphorique de WQ ressemble fort à celles qu’on utilisait en occident dans les années 70 pour l’illustration de magazines. Mêmes maux, mêmes effets ?

Pour nous (qui ne sommes pas des dirigeants politiques ou économiques chinois !) l’oeuvre de Wang Quinsong est très ludique. Et c’est peut-être une des clés de son succès.

Thinker

Thinker
Est-ce qu’en Chine on sert les hamburgers sur des feuilles de chou ?


Requesting Buddha
Requesting Buddha
Le boudhisme a apporté bonheur et sagesse au peuple chinois pendant des milliers d’années. Rien d’étonnant à ce qu’on le retrouve aujourd’hui, dévoyé au profit de la consommation.


Can I Cooperate
Can I Cooperate with You ?
Voici un bel exemple d’interprétation de peinture traditionnelle à la lumière des préoccupations contemporaines.


Another battle
Another Battle
Dans cette série datant de 2001, WQ met en scène des batailles militaires. Dans chaque image, des marques commerciales très connues sont mises dans une situation triviale avec un humour cynique. Accessoirement, WQ figure sur chaque photo.


China mansion
China Mansion
China Mansion nous montre une résidence chinoise dans laquelle WQ invite les artistes occidentaux en de multiples citations et détournements.


Commercial War
Commercial War
Sur ce mur de 40 m de large, WQ a fabriqué et disposé 3000 affiches publicitaires pour toutes les grandes marques commerciales occidentales. Il compare cette guerre aux espaces publicitaires à un psoriasis qui dévore les villes chinoises. Les « Da zi bao », messages politiques d’antan, on été remplacés par la compétition pour le « business ».


Follow me
Follow me
Autre exemple dans la tradition du « Da zi bao »


Poisonous spider
Poisonous Spider
Dans cette installation WQ a réalisé une toile d’araignée de 16m de diamètre en fil de fer barbelé. Les objets pris dans la toile sont des produits de consommation.


Wang Quingsong vit et travaille en Chine ou il est né en 1966. Il est le lauréat du prix Dialogue de l’Humanité aux Rencontres d’Arles de cette année(liens cassés !).
Le site de WangQuingsong, d’où sont extraites les photos montrées ici et où vous pourrez en voir encore bien d’autres.

Béat Brüsch, le 31 juillet 2006 à 01.15 h
Rubrique: Regarder en ligne
Mots-clés: Arles , exposition , photographe
3 commentaires
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    1

    J’avais vu certains travaux de Wang Qingsong sur le net, avant d’aller à Arles. C’est intéressant. Ce travail est évidemment en décalage par rapport à la prise de de conscience qui s’est faite en occident dans les années 70 autour de la consommation et de ses excès. A ce titre, effectivement, on peut le considérer comme “kitsch”.

    “Il est intéressant de constater que ce type de mise en boîte des méfaits de la consommation n’est possible aujourd’hui qu’en Chine. Dans nos contrées, cela ne frappe plus guère, car nous avons eu le temps de nous habituer !” :
    C’est à la fois vrai (malheureusement) mais la critique, initiée notamment par Baudrillard dans les années 70, devrait avoir une actualité, particulièrement dans le domaine de la consommation des biens culturels.
    J’y fais référence au sujet de “Bande à p(ART)”

    Envoyé par holbein, le 3.08.2006 à 11.11 h
    En ligne ici
    2

    les travaux de Wang ont été présentés à la biennale chinoise de Montpellier l’an passé et j’avais beaucoup aimé ses mises en scène inspirées je trouve des affiche de propagande de l’époque rouge...
    dans la "nouvelle vague" des artistes présentés à Arles j’ai trouvé que ces travaux étaient les plus intéressants.

    Envoyé par plexigirl, le 1er.09.2006 à 20.01 h
    En ligne ici
    3

    J’ai découvert ses oeuvres il y a 3 ans, on pouvait alors se procurer des grands formats de Wang Quingsong pour 2500 US$. La semaine dernière à NY, une de ses oeuvres les plus médiatisées (le grand tableau noir) a été vendue 318.000 US$...
    La démarche de cet artiste est une des plus complète que je connaisse en Chine. Ses références cachées aux oeuvres occidentales font systématiquement appel à des références purements chinoises. Chacune de ses oeuvres est un jeu de piste incroyable. certaines d’entre elles sont incroyablement violentes mais il les montre peu et elles ne se vendent pas. La visite de son site vaut le détour. Bravo pour votre blog. Bravo pour votre goût. Les images de Loctudy me font déjà regretter de ne pas être en train de siroter un café au café de la cale à Ste Marine. Passez y pour moi.

    Envoyé par pierre, le 29.09.2006 à 10.06 h